La compagnie Woods Manufacturing

La compagnie Woods Manufacturing

À l’origine, tous les sacs de couchage étaient rectangulaires, à la façon d’une couverture pliée en deux sur le sens de la longueur, et isolés au moyen de couches superposées de couvertures, de molleton de laine ou de plumes d’oie. Cela en faisait des articles plutôt gros et lourds et aucun ne connut de succès durable.

Jusqu’à ce que la compagnie Woods Manufacturing Ltd de Hull mette au point la couverture-édredon de couchage arctique, un modèle qui définira le terme sac de couchage.

Au fil des ans, la Woods a porté les noms suivants : d’abord la Woods Manufacturing Co, puis, lorsque la Smart Bag Company de Montréal fondée par Charles A. Smart, fusionne en 1913 avec la Woods Manufacturing Co., la nouvelle entité se nomme temporairement la Smart-Woods Ltd. En 1918, la manufacture reprend le nom de Woods Manufacturing Co.

Les débuts

Le lieutenant-colonel James William Woods fonde en 1885 une compagnie qui équipe les bûcherons de la vallée de l’Outaouais d’articles en toile.

La Woods s’installe dans un immeuble de sept étages, sur la rue Slater à Ottawa en 1896. Elle ne se contente plus de fournir le matériel, mais les fabrique elle-même désormais : tentes, sacs de couchage et autres articles faits d’une nouvelle toile ultralégère et hydrofuge.

Le ministère des Travaux publics, qui loue une partie de l’immeuble de la rue Slater pour divers ministères, la Milice et Défense, l’Intérieur et l’Agriculture, menace d’exproprier la Woods qui décide donc de déménager de l’autre côté de la rivière en 1906. La Woods s’installe dans un vaste immeuble de cinq étages, au 258 de la rue Laurier, à Hull.

Pour sa part, Charles Allan Smart, né le 23 mars 1868 à Montréal, fils de cordonnier devenu lieutenant-colonel de l’armée, termine son mandat d’officier commandant en 1907 et se retire. Il se joint à la réserve des officiers et met son expérience des affaires à profit en fondant la Smart Bag Company Limited qui produit des sacs de jute et de coton, de la toile de tailleur, du bougran, de la toile de jute, de la ficelle et autres articles dans une fabrique au 800 de la rue Mullins, à Montréal.
Smart ouvre bientôt des manufactures à Toronto et à Winnipeg, puis il s’associe à James William Woods en 1913. [Smart est décédé en 1937 à Westmount.] À Hull, l’industrie du textile devient la 2e industrie en importance, immédiatement après celle du papier.

L’année suivante, la Smart-Woods Limited achète la manufacture Empire Cotton à Welland. La gamme de produits s’enrichit encore; elle inclut désormais tentes, auvents, coutil [toile croisée et serrée, en fil ou en coton, utilisée dans la confection de vêtements robustes] et tissu écru.

Au cours de la 1re guerre mondiale, la Woods approvisionne l’armée en articles en toile, en tentes et sacs de couchage, et en masques à gaz, les 1ers pour l’Armée canadienne.

Vu la popularité croissante de ses produits aux États-Unis, la Woods ouvre en 1920 une manufacture et un bureau de vente à Ogdensburg, dans l’état de New York à proximité de la frontière (probablement pour échapper aux droits et taxes d’importation).
À partir des années 1920, la couverture est vendue à une clientèle fortunée par des magasins de matériel de sport. La couverture est le produit idéal pour ces boutiques haut de gamme.
Au prix moyen de 65 $, soit 1 202 $ en dollars de 2016, il s’agissait d’un produit que ne pouvaient s’offrir que les biens nantis.

Ernest Hemingway fait de nombreuses allusions à la couverture de couchage arctique de Woods dans son roman Pour qui sonne le glas? (1940) Il la connaissait bien, en possédant une.

En 1942, la Woods Manufacturing Co. compte 500 employés.

Une grève est déclenchée à la Woods Manufacturing en 1947. Deux cents employés avaient adhéré à la Amalgamated Clothing Workers of America. Cependant, au terme de l’arrêt de travail 18 juin 1948, il ne reste plus que 95 grévistes et seule une dizaine reprennent le travail. De plus, l’écart entre les salaires des hommes et des femmes n’a nullement été réduit.

Au cours de la décennie s’étendant de 1951-1961, 400 emplois environ sur 700 sont perdus dans le secteur du textile à Hull, notamment à la suite de la disparition de la Sparks Harrison LTD et de la Sobies Silk.

En 1960, la CCN exproprie la Woods Manufacturing qui ferme sa manufacture de la rue Laurier. La compagnie poursuit ses activités ailleurs au Canada. L’immeuble n’a pas été rasé immédiatement : une petite compagnie de textile en a occupé une partie pendant quelque temps[1].

Au cours de la 2e moitié du 20e siècle, la gamme des articles de plein air de la Woods s’est étoffée. Le 1er juillet 1967, Lester B. Pearson déployait au sommet de la Tour de la Paix, un exemplaire du nouveau le drapeau du Canada, fourni par la Woods…

Aujourd’hui, la Woods poursuit toujours ses activités au Canada. Son siège social se trouve à Scarborough en Ontario et elle exporte ses produits, tentes et accessoires, sacs de couchage, matelas, lits de camp, lits pneumatiques, vêtements, réchauds et accessoires de cuisine, éclairage, sacs à dos, fauteuils et tables de camping, abris et abris moustiquaires, couteaux et autres., aux États-Unis, en Europe et au Japon.

Visitez le site suivant de Woods Canada; vous y trouverez de l’information complémentaire, ainsi que d’intéressantes photographies et illustrations : http://www.woods.ca/fr/woods-legacy

[1] Si quelqu’un a des détails sur cette entreprise ou connaît la date précise à laquelle l’immeuble a été rasé, prière de communiquer avec l’auteure.

Auteure : Louise Dumoulin